Condamnation de l'agresseur du journaliste Frédéric Farine

Le 16 décembre 2003, Jean Bena a été condamné par le tribunal de Cayenne à une peine de quatre mois de prison avec sursis et 3 000 euros d'amende pour avoir agressé Frédéric Farine le 14 mai. Le tribunal a également condamné l'orpailleur à verser à la victime 1 500 euros en réparation du préjudice moral et 800 euros en remboursement des frais d'avocat. Il a justifié la sévérité de la peine par "la gravité des faits, de leur contexte et de la personnalité de l'auteur". Jean Bena a dix jours pour faire appel de cette décision. ------------------------------------------- 15.05.2003 - Reporters sans frontières choquée par l'agression d'un journaliste Reporters sans frontières est "choquée" par l'agression du journaliste Frédéric Farine par Jean Bena, un important patron orpailleur. "Cette agression est malheureusement l'aboutissement d'une longue suite de menaces reçues par le journaliste. L'orpaillage est devenu un sujet délicat pour ceux qui se risquent à dénoncer les pratiques en cours dans ce milieu, dont le recours à la torture. Qu'on en soit arrivé là sur le territoire français est proprement choquant et inadmissible. L'agresseur doit être sévèrement sanctionné", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières, dans une lettre adressée à Ange Mancini, le préfet de la Guyane. L'organisation a demandé à M. Mancini à être tenue informée des avancées de l'enquête ouverte à la suite de la plainte déposée par Frédéric Farine. Elle a également demandé des explications sur le comportement des policiers qui n'ont pas interpellé l'agresseur. Enfin, Reporters sans frontières a demandé au préfet d'étudier avec le journaliste les éventuelles mesures de protection qui seraient nécessaires pour garantir sa sécurité. Selon des informations recueillies par Reporters sans frontières, Frédéric Farine a été violemment agressé par le patron orpailleur Jean Bena, le 14 mai 2003 en début d'après-midi, alors qu'il couvrait pour la chaîne de télévision RFO Guyane le procès pour assassinat d'un ancien employé de ce dernier. D'après un collègue, Frédéric Farine a été insulté et a reçu une dizaine de gifles et de coups de poing de son agresseur, visiblement hors de lui. Ce dernier reprochait au journaliste d'avoir cité son nom dans un reportage. Deux policiers à moto ont assisté à la scène sans intervenir. L'agression a pris fin après l'intervention de policiers en civils qui ont maitrisé Jean Bena sans même l'interpeller. D'après Frédéric Farine, ils le tutoyaient en lui disant : "Jean, calme-toi". Le journaliste a immédiatement porté plainte pour "violences volontaires et menaces de mort". Informé par la police que son agresseur rôdait dans le quartier, il n'a pu quitter les lieux qu'une fois accompagné de son rédacteur en chef venu le chercher au commissariat. Avec Laurent Marot, correspondant en Guyane du quotidien Le Monde, Frédéric Farine est connu pour ses articles sur les violences dans le milieu de l'orpaillage. Les deux journalistes figurent dans le dernier rapport annuel de Reporters sans frontières dont voici un extrait : Le 1er juillet 2002, Frédéric Farine, correspondant du quotidien français La Croix et de Radio France Internationale (RFI), est accusé de "pédophilie" et de "détournement de mineurs" par deux membres de la Fédération des organisations minières de Guyane (FEDOMG) au cours d'une conférence de presse à Cayenne. Frédéric Farine est connu pour ses enquêtes sur les milieux de l'orpaillage. Trois jours avant la conférence de presse, dans un article intitulé "Travail forcé sur le Maroni [Centre-Ouest]", il avait rapporté le témoignage de Brésiliens accusant un patron orpailleur, Jean Bena, de les avoir contraints au travail forcé après leur avoir confisqué leur passeport. Le 18 juin, il avait couvert, pour Radio Caraïbes International (RCI), Radio France Internationale et www.rfi.fr, le procès de quatre orpailleurs de Maripasoula (frontière du Surinam) condamnés à cinq ans de prison pour avoir torturé un chercheur d'or brésilien. En juillet 2001, il avait également cosigné avec Laurent Marot, correspondant du quotidien français Le Monde, un reportage dénonçant l'existence de "quasi-milices" des patrons de l'orpaillage "qui font régner la terreur dans la région" et l'attitude des autorités à leur égard. Depuis, Laurent Marot et Frédéric Farine avaient reçu des menaces à plusieurs reprises. Un proche de Jean Bena a prévenu le correspondant du Monde : "Vous êtes les premiers sur la liste". Selon Laurent Marot, en février 2002, suite à la diffusion sur Radio Guyane d'un nouveau reportage sur l'orpaillage, Joseph "Popo" Machine, un autre patron orpailleur, l'avait appelé : "Marot, tu devrais t'intéresser à d'autres choses que l'orpaillage à Maripasoula. On en a assez de toi. Fais bien attention." Un mois plus tard, le même orpailleur le met en garde : "Comme Farine, tu nous emmerdes avec tes reportages. On va s'occuper de toi."
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Updated on 20.01.2016