Chine : un journaliste condamné à 15 ans de prison pour avoir dénoncé la corruption du Parti

Reporters sans frontières (RSF) appelle Pékin à immédiatement libérer le journaliste Chen Jieren, condamné la semaine dernière à 15 ans de prison pour avoir dénoncé des faits de corruption au sein du Parti communiste.

Le journaliste chinois Chen Jieren, 48 ans, qui avait rendu publics des faits de corruption mettant en cause des cadres du Parti communiste chinois, a été condamné le 30 avril à une peine de 15 ans de prison par le tribunal populaire du comté de Guiyang, dans la province du Hunan (centre). Cette condamnation est l’une des plus lourdes jamais prononcée contre un journaliste depuis l’arrivée au pouvoir du président Xi Jinping en 2013. Accusé d’avoir « attisé des querelles et provoqué des troubles » et pratiqué « l’extorsion, le commerce illégal et la corruption », Chen Jieren s’est aussi vu infliger une amende de sept millions de yuans (près d’un million d’euros), soit environ 53 années de salaire moyen d’un journaliste en Chine.


« Cette condamnation ubuesque, qui nous ramène aux pratiques de l’ère maoïste, vise à l’évidence à faire un exemple pour qu’aucun journaliste chinois ne se risque plus à mettre en cause le régime, s’indigne Cédric Alviani, directeur du bureau Asie de l’Est de Reporters sans frontières (RSF), qui appelle Pékin à « annuler ce verdict honteux et immédiatement libérer Chen Jieren ainsi que tous les autres journalistes et commentateurs emprisonnés en Chine. »


Un frère du journaliste, le blogueur Chen Weiren, a été condamné dans le même jugement à quatre ans de prison et une amende de 10 000 yuans (près de 1 300 euros). Le journaliste, son épouse, ses deux frères ainsi que deux de ses collaboratrices avaient été arrêtés en juillet 2018 et détenus à l’isolement sous le régime dit de « résidence surveillée dans un lieu désigné » (RSDL), un euphémisme qui désigne les « prisons noires » chinoises. Le compte social WeChat du journaliste avait également été désactivé et la télévision publique avait diffusé ses « confessions » en août 2018.


Avant de se mettre à son compte, Chen Jieren avait travaillé pour plusieurs médias de propagande chinois dont le Quotidien de la jeunesse, le Quotidien de Pékin et le Quotidien du peuple, d’où il avait à chaque fois été renvoyé pour le ton jugé trop critique de ses articles.


La Chine est la plus grande prison au monde pour les journalistes avec au moins 112 d'entre eux détenus dans des conditions qui laissent craindre pour leur vie. Ces dernières années, de très lourdes peines ont été prononcées à l’encontre de journalistes en Chine : en juillet 2018, le commentateur Qin Yongmin, 66 ans, a été condamné à 13 ans de prison pour « subversion » ; en juillet 2019, le lauréat du Prix RSF de la liberté de la presse 2004 et 2016, Huang Qi, 56 ans, s’est vu infliger une peine de 12 ans de prison pour « révélation de secrets d'État » ; en décembre 2017, le blogueur Wu Gan, 47 ans, a pour sa part été condamné à 8 ans de prison pour « subversion. »


La Chine se situe au 177e rang sur 180 pays dans le Classement mondial RSF de la liberté de la presse 2020.

Publié le
Updated on 07.05.2020