Bangladesh : le meurtre du journaliste Golam Nadeem par un potentat local ne doit pas rester impuni
Basé dans le centre-nord du Bangladesh, le journaliste venait de publier une série d’articles sur un scandale de mariage secret impliquant un chef de municipalité, qui avait déjà porté plainte contre lui – en vain. Reporters sans frontières (RSF) appelle le parquet à tout mettre en œuvre pour identifier les auteurs de cet assassinat sauvage et les traduire en justice.
Les médecins n’ont rien pu faire. Le journaliste Golam Rabbani Nadeem a succombé à ses blessures aujourd’hui, jeudi 15 juin, vers 14 h 30, à l'hôpital de Mymensingh, une ville située à 120 kilomètres au nord de Dacca, la capitale.
Correspondant dans le district voisin de Jamalpur pour le portail Banglanews24.com et la chaîne d’information en continu Ekattor Television, il a été la cible d’une attaque particulièrement violente la veille au soir, vers 22 heures.
Alors qu’il rentrait du travail à deux-roues, il est tombé dans une embuscade dressée par une dizaine d’assaillants dans le centre de la petite ville de Bakshiganj. Son confrère Al Mujahid Babu, qui a assisté à la scène sans pouvoir intervenir, a expliqué que les agresseurs, armés de machettes et de barres de fer, ont littéralement traîné le journaliste dans une allée sombre pour le rouer de coups. Ils l’ont laissé inconscient.
“Le meurtre atroce de Golam Rabbani Nadeem ne saurait rester impuni. Nous appelons le parquet bangladais à tout mettre en œuvre pour retrouver les auteurs de cet assassinat sordide et, surtout, traduire en justice son instigateur, dont l’identité laisse peu de place au doute. Face à la recrudescence des violences visant les journalistes bangladais, RSF encourage le gouvernement de Sheikh Hasina à lancer un chantier en vue d’établir une législation pour la protection des acteurs de l’information dans le pays.
Lui-même pris à partie, Al Mujahid Babu affirme avoir reconnu, dans le tumulte, la figure d’un potentat local, Mahmud Alam Babu, maire de la commune de Sadhupara et secrétaire général de la branche local de la Ligue Awami, le parti au pouvoir au Bangladesh. “Il attendait dans le noir, supervisant l’attaque”, explique le journaliste à RSF.
Violences grandissantes
La cause de cette attaque ne fait, selon lui, pas de mystère : “Golam Nadeem et moi avons publié une série d’articles sur un scandale de mariage secret visant le maire de Sadhupara, Mahmud Alam Babu, dont l’une des épouses avait organisé une conférence de presse après qu’il eût refusé de reconnaître son second mariage.”
Selon les informations de RSF, ce même maire avait tenté de faire taire les deux journalistes en portant plainte contre eux en vertu de la loi sur la sécurité numérique. Le tribunal de Mymensingh avait classé l’affaire sans suite. Cela n’a, vraisemblablement, pas suffi à calmer les ardeurs de l’édile.
Le chef de la police de Jamalpur a déclaré, ce jeudi 15 juin, avoir pu identifier la plupart des assaillants grâce aux caméras de télésurveillance. Trois d’entre eux auraient déjà été interpellés.
Les journalistes bangladais sont la cible de violences grandissantes, la plupart du temps orchestrées par des potentats locaux liés à la Ligue Awami. RSF avait tiré la sonnette d’alarme en début d’année, après avoir compté au moins sept attaques violentes contre des acteurs de l’information en moins de deux mois.
