Nouvelle loi sur la diffamation au Kenya : les journalistes encourent désormais dix ans de prison
Au Kenya, la diffusion de fausses nouvelles et la diffamation sur le net sont désormais passibles de lourdes de peines de prison après la promulgation d’une nouvelle loi par le président. Reporters sans frontières (RSF) dénonce des peines disproportionnées qui menacent la liberté de la presse.
42 000€ d’amende et dix ans de prison, c’est la peine maximum à laquelle seront désormais exposés les journalistes en cas de diffamation en ligne. Ces nouvelles sanctions font partie du nouveau Computer and Cybercrimes Act, promulgué par le président Uhuru Kenyatta le 16 mai 2018. De la même manière, toute publication intentionnelle de fausse nouvelle qui “constitue un discours de haine” ou “porte atteinte à la réputation des autres” risque une peine allant jusqu’à deux ans de prison.
“Aucun journaliste ne devrait encourir une peine de prison pour diffamation, estime Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique à Reporters sans frontières. Ces peines sont disproportionnées et n’ont pour objectif que de faire pression sur les blogueurs et journalistes. Pour les médias kenyans, ce nouveau tour de vis va élargir un peu plus le pouvoir de contrôle des autorités sur les publications en ligne”.
Le projet de loi avait été voté par le Parlement du Kenya le 26 avril dernier. Le texte a été promulgué malgré les mises en garde des associations de la presse sur les menaces pour la liberté de l'information. David Omwoyo, vice-président du Media Council, avait exprimé le 11 mai sa réserve sur cette régulation qui ”pourrait être utilisée par les autorités pour entraver la liberté de la presse”.
Ce n’est pas la première fois qu’une loi visant à intimider les journalistes est instituée au Kenya. En 2013, le Parlement avait adopté le Media Council Act permettant au gouvernement de censurer les médias lorsque ceux-ci critiquent les autorités, en les menaçant de suspension et d’amendes exorbitantes. Lors des élections en 2017, les autorités avaient également émis une série de consignes pour les journalistes, telles que l’interdiction de publier les résultats électoraux.
Le Kenya occupe la 96e place sur 180 dans le classement mondial 2018 de la liberté de la presse établi par RSF.