Égypte : RSF demande la libération de Tawfik Ghanem en détention provisoire depuis deux ans

Cela fait deux ans que Tawfik Ghanem est détenu en Égypte sans avoir été jugé : une pratique courante dans le pays, où 12 des 20 journalistes emprisonnés sont en détention provisoire. Reporters sans frontières (RSF) demande la libération inconditionnelle du journaliste et de ses collègues emprisonnés par le pouvoir égyptien


Mise à jour du 13/06/24 : la détention arbitraire sans procès de Tawfik Ghanem a été prolongée de 45 jours le 10 juin. Il est emprisonné sans procès depuis déjà 1 020 jours.


Il entame sa troisième année derrière les barreaux. Arrêté par les forces de l’ordre à son domicile le 21 mai 2021, le journaliste égyptien Tawfik Ghanem, ancien rédacteur en chef du site d’information Islam Online et directeur du bureau local de l’agence de presse turque Anadolu de 2013 à 2015, avait disparu avant de réapparaître cinq jours plus tard devant le procureur général pour être informé des charges pesant contre lui. La justice égyptienne l’accuse d’appartenir à “une organisation interdite" et d’avoir diffusé des “fausses nouvelles". Deux chefs d'accusation régulièrement utilisés contre les journalistes en Égypte. Mais Tawfik Ghanem n’a toujours pas eu droit à un procès. Depuis le 26 mai 2021, son maintien en détention provisoire est renouvelé tous les 15 ou 45 jours. Une détention prolongée arbitraire alors que, selon le code de procédure pénale égyptien, la durée maximale autorisée pour les détentions préventives, quel que soit le chef d’accusation, est de deux ans. 

Cette situation est d’autant plus alarmante que le journaliste de 69 ans, qui a de sérieux problèmes de santé, est privé de soins médicaux par les autorités égyptiennes. Diabétique de longue date, il ne peut compter que sur la visite de ses enfants, une semaine sur deux, à la prison d’Abou Zaabal, au nord du Caire, où il est incarcéré, pour recevoir le traitement dont il a besoin. Ses autres maladies chroniques, dont des douleurs osseuses, sont négligées par les autorités pénitentiaires. En 2021, un médecin de la prison avait demandé que Tawfik Ghanem soit envoyé à l’hôpital pour des examens complémentaires concernant des tumeurs. Cette demande n’a jamais abouti malgré les promesses des autorités égyptiennes

“Les autorités égyptiennes doivent cesser d'utiliser la détention provisoire comme un outil punitif contre les journalistes. Tawfik Ghanem est un professionnel des médias courageux et intègre qui ne devrait pas avoir à passer sa retraite en prison. Nous dénonçons cette injustice flagrante et demandons l’abandon des charges, sa libération immédiate, afin qu'il puisse notamment recevoir au plus vite des soins médicaux appropriés.”

Jonathan Dagher
Responsable du bureau Moyen-Orient de RSF

Tawfik Ghanem était dans le viseur des autorités égyptiennes pour ses années passées à la tête du bureau local de l’agence de presse turque Anadolu, et l’influence qu’il a pu avoir sur la ligne éditoriale  du média  et notamment sa couverture du coup d’État du 3 juillet 2013. Bien qu’il ait finalement pris la décision de renoncer à son poste en 2015, le journaliste a été frappé par une interdiction de quitter le territoire égyptien à partir de 2017 et ses avoirs ont été gelés.

Deux mois après son arrestation, en juillet 2021, RSF avait adressé une lettre aux Rapporteurs spéciaux des Nations unies pour la liberté d'expression, la torture, l'indépendence des juges et le droit à la santé, ainsi qu'au Groupe de travail des Nations unies pour les détentions arbitraires, les appellants à prendre toutes les mesures nécessaires vis-à-vis des autorités égyptiennes pour que Tawfik Ghanem soit libéré immédiatement et sans condition.

Au moins quatre autres journalistes égyptiens sont actuellement en détention préventive depuis une période excédant deux ans. Au total, 12 des 20 journalistes détenus dans le pays sont en détention provisoire. Un chiffre légèrement revu à la baisse suite à la libération le 1er mai 2023 de Raouf Ebeid, rédacteur en chef du quotidien Rose al-Yusuf, et de Hisham Abdel Aziz, producteur de la chaîne Al Jazeera Mubasher, respectivement retenus en détention provisoire pendant plus d’un an et plus de quatre ans.

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