Arrestation de Duterte aux Philippines : RSF rappelle que 20 journalistes ont été tués sous sa présidence

Alors que l’ancien président philippin Rodrigo Duterte a été arrêté dans le cadre d’une enquête de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes contre l’humanité liés à sa “guerre contre la drogue”, Reporters sans frontières (RSF) rappelle que 20 journalistes ont été tués sous sa présidence, un mandat de six ans marqué par une répression féroce de la presse. RSF appelle le président actuel Ferdinand Marcos Jr et son administration à lutter contre l’impunité des crimes passés sous la mandature de  Rodrigo Duterte contre les médias et à prendre des mesures fortes pour rétablir pleinement la liberté de la presse dans le pays.

“Ce n’est pas parce que vous êtes journaliste que vous échapperez à un assassinat si vous êtes un fils de pute.” Le 30 juin 2016, lors de son investiture l'ancien président Rodrigo Duterte annonçait la couleur de son mandat : violence désinhibée contre les journalistes et mépris total de la liberté de la presse. 

Pendant les six ans de sa présidence, RSF a recensé 20 cas de journalistes tués dans l’exercice de leurs fonctions. Parmi eux, Jesus Yutrago Malabanan, dit “Jess Malabanan”, abattu en décembre 2021 après avoir couvert la guerre contre la drogue pour l’agence Reuters. De plus, les campagnes de cyberharcèlement se sont multipliées, notamment contre les femmes journalistes. La cible la plus emblématique est Maria Ressa, prix Nobel de la paix et fondatrice du site d’information Rappler, victime d’une campagne de haine orchestrée par une armée de trolls à la suite de son engagement à couvrir l’horreur de la guerre sanglante de l’ancien président.

Les médias critiques des dérives autoritaires du président Duterte ont par ailleurs subi une répression systématique : le principal réseau audiovisuel du pays, ABS-CBN, a été contraint à la fermetureRappler et Maria Ressa ont fait l’objet de multiples poursuites ; un proche du président a racheté le quotidien de référence Philippine Daily Inquirer, suscitant des inquiétudes quant à son indépendance éditoriale.

“L’arrestation de Rodrigo Duterte est une bonne nouvelle pour les journalistes philippins, qui ont été les victimes directes de sa politique de terreur. Le président Marcos et son administration doivent désormais enquêter sur les crimes passés de Duterte contre les médias et prendre des mesures fortes pour rétablir pleinement la liberté de la presse dans le pays.

Cédric Alviani Director
Directeur du bureau Asie-Pacifique de RSF

La répression menée sous sa mandature continue d’affecter le journalisme philippin : la journaliste d'investigation Frenchie Mae Cumpio croupit toujours en prison depuis son arrestation en 2020 et est en attente d’un verdict dans son procès pour “financement du terrorisme” et “possession illégale d’armes à feu”, des charges fallacieuses qui pourraient lui valoir une peine de 40 ans de prison.

Avec 147 cas de journalistes tués dans l’exercice de leurs fonctions recensés par RSF depuis la restauration de la démocratie en 1986, les Philippines sont l'un des pays les plus dangereux pour les journalistes et les défenseurs de la liberté de la presse. L’archipel se classe au 134e rang sur 180 pays et territoires dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2024.

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