RSF demande à Madrid d’aider à débloquer la situation du journaliste Manuel Martorell, classé comme « terroriste » par les Etats-Unis. Le journaliste espagnol Manuel Martorell, spécialisé sur les questions kurdes, vit un enfer depuis plus de six mois, après avoir été injustement classé comme ”terroriste” par le Département d’Etat américain. Reporters sans frontières appelle les autorités espagnoles à démêler cette sombre affaire portant préjudice au reporter et historien de renom.
Tout a commencé en mai 2015, quand Manuel Martorell a fait une demande de visa pour se rendre en vacances avec sa famille aux Etats-Unis, et que ce document lui a été refusé, Le consulat des Etats-Unis à Madrid l’a convoqué, lui demandant de présenter officiellement sa demande. Là, Martorell a été amené à remplir un questionnaire écrit sur sa trajectoire personnelle et professionnelle, ainsi que celle de certains membres de sa famille.
Trois mois plus tard, le journaliste –qui a dû annuler son voyage avec tous les dommages économiques et personnels que cela a supposé- recevait un courrier du Département d’Etat lui expliquant que sa demande de visa était refusée parce qu’il était accusé d’avoir participé à des « activités terroristes ».
Cette accusation extrêmement grave a placé le journaliste dans une situation de totale vulnérabilité, dans le contexte actuel de montée du terrorisme. La section espagnole de RSF a entamé, à plusieurs reprises, des démarches auprès des administrations espagnole et américaine en Espagne, sans succès. RSF n’a jusqu’ici obtenu aucune réponse, ni de l’ambassade des Etats-Unis à Madrid, ni du Ministère espagnol des Affaires Étrangères, ni Secrétariat Espagnol de l’Information.
“Cette situation doit se résoudre de manière urgente, nous demandons au Ministre des Affaires Étrangères, M. José Manuel García Margallo, de faire tout ce qui est en son pouvoir pour que l’administration américaine rectifie et éclaircisse les raisons qui ont provoqué cette erreur déplorable. Manuel Martorell est un journaliste réputé, cela fait plus de six mois qu’il est considéré comme “terroriste”. Cette qualification l’empêche non seulement de se déplacer librement, mais peut entraîner des conséquences très graves”, affirme Malén Aznárez, presidente de RSF Espagne.
Au delà de la légitime rectification du Département d’État américain, Manuel Martorell exige une explication claire des raisons qui ont mené les Etats-Unis à l’accuser “d’une telle atrocité”. “Je n’ai jamais intégré ni soutenu aucune organisation politique, ni espagnole ni étrangère. Pour moi, le terrorisme est le plus grand crime dont je puisse être accusé, formuler une telle accusation sans livrer la moindre explication est une atteinte aux principes élémentaires du droit national et international”, déplore le journaliste et historien.
Selon lui, cette accusation injuste pourrait avoir un lien avec sa spécialisation dans la question kurde, sur laquelle il a produit des centaines d’articles, rapports, documentaires et plusieurs livres, pendant ses 30 ans de carrière.
De nombreuses associations de journalistes, partis politiques, avocats et autres organisations ont pris la défense de Manuel Martorell. Le Parlement régional de Navarre (sa région d’origine), a même approuvé à l’unanimité une déclaration de soutien à sa cause.
Après moult échanges entre les autorités américaines et espagnoles, le journaliste a été dernièrement encouragé à soumettre une nouvelle demande de visa. Il a passé un nouvel entretien au consulat des Etats-Unis à Madrid, et attend à présent la décision du Département d’Etat américain.